Paul Ricœur (1913-2005) est rarement commenté pour sa pensée politique, même si elle constitue chez lui une préoccupation constante, qui traverse l’ensemble de son œuvre. Cela tient sans doute au fait que le philosophe n’a consacré aucun ouvrage au politique en tant que tel et que seul un petit nombre de ses textes politiques ont été repris sous forme de recueils (ainsi Lectures 1. Autour du politique, Seuil, 1991).
Cette situation n’est sans doute pas tout à fait le fruit du hasard, mais plutôt le fait d’une pensée post-totalitaire. Convaincu que le mal politique consiste à se prétendre détenteur d’une vérité ultime, Ricœur s’est abstenu de donner à sa réflexion l’allure d’une synthèse définitive, préférant un style qu’il qualifie lui-même de fragmentaire.
Mais il s’attache aussi à répliquer aux totalitarismes du XXe siècle en proposant une issue pour surmonter le « désenchantement du monde » théorisé par Max Weber.
Au caractère desséchant de la raison technicienne, Ricœur oppose les ressources de l’imagination, de l’inventivité du langage et de la poésie.