Tout d’abord WM penseur du spirituel et du social conçus comme les deux facettes inséparables du témoignage rendu à Jésus Christ questionne la laïcité française en qui il voit une propension de l’Etat à confiner la religion dans une piété individualiste et désincarnée ; une religion qui contredit sa vision d’un Evangile intégral ; WM s oppose a cette religion de "fuyards".
La loi de 1905 qui met un terme à la collusion des pouvoirs a comme dégât collatéral l’étouffement des révoltes contre le désordre et l’injustice établie au profit d’une résignation contraire a l’Evangile.
Un autre point de la pensée de WM que souligne LG est l’analyse qu’ il fait de la place que l’argent a pris dans notre société ; l’argent en soi n’est ni bon ni mauvais, mais il devient une aliénation mortelle pour le riche qui s’en fait une idole à laquelle il est prêt à sacrifier toute sa vie. En même temps par la concurrence à laquelle il doit se soumettre pour toujours thésauriser plus, il accapare cet "outil" et en dépossède ainsi le plus grand nombre qui sombre dans une misère que sa passion dévorante provoque.
Le riche dit-il en devient athée et donc totalement étranger au royaume de Dieu et sa justice.
Pour pointer un autre aspect de la pensée de WM, LG évoque son "féminisme". En la matière, on ne doit pas craindre de dire qu’ il fut un précurseur, dans l’église comme dans la société ; d’un discours prononcé en 1912 en présence de Ferdinand Buisson en faveur du droit de vote des femmes où il montre que la femme est humiliée, sacrifiée, tenue en tutelle, en esclavage en passant par une prédication prononcée en 1932 dans laquelle il montre que les femmes auraient tort d’attendre des hommes le cadeau de leur libération, qu’il leur appartient de prendre en main leur propre cause WM ne cessa toute sa vie de militer pour l’égalité "hommes ,femmes" ; lutte qui l’amena aussi à se pencher sur "l’iniquité foncière" qui dans la langue française donne la prééminence au masculin.
On constate ici la clairvoyance de WM qui résonne avec notre actualité.
Pour conclure disons aussi que "par-delà" ou plutôt "en-deçà" de cet Evangile intégral WM préoccupé par la "venue" du royaume et de la nécessaire "active fraternité", est loin de mépriser le culte, la liturgie, la célébration des sacrements (le baptême et la cène) ; il en fait au contraire le socle de cet engagement pour le Royaume de paix et de justice.
En effet pour lui une diaconie au service de l’autre qui ne s’enracine pas dans l’Evangile de Jésus Christ annoncé par la prédication, célébré dans les sacrements devient un humanisme fade, indécis et friable.
Inversement un culte rendu à Jésus Christ sans l’impérieuse nécessité de résister au malheur de l’injustice et de lutter pour la paix est une hypocrisie.
Merci à Laurent Gagnebin de nous aider à entrer dans la pensée de Wilfred Monod dont il n’hésite pas à souligner la proximité avec cet autre grande figure combattante et Evangélique du XX° siècle que fut Dietrich Bonhoeffer pasteur, théologien assassiné pour son engagement politique dans la résistance au nazisme.
Jean Pierre Rive, pasteur ancien président de la commission
église et société de la FPF