Dans les représentations de la ville, notons la mise en avant de la condition des femmes (chevauchant dignement vers le mariage, ou violentées) et la place du savoir et des arts ou artisanats, par opposition à la guerre, à la violence, aux factieux.
Saisissons donc la corde qui au lieu de lier les personnages les relie, les unit librement, dans un projet commun, comme cette institution qui, sur une période de 68 ans, entre le XIIIe et le XIVe siècle, avant la peste noire de 1348 et les troubles qui suivirent, avait permis à Sienne une riche vie communale, avec ce gouvernement des « vingt-quatre » renouvelé tous les six mois (entre 3000 et 4000 personnes en firent partie à tour de rôle).
L’important n’est pourtant pas la forme d’un gouvernement. Mais que la ville, espace collectif autant imaginaire que réel, puisse être la résultante, non définitive mais toujours en chantier, du projet tissé librement ensemble par ses membres ou par une délégation de ses membres. La bonne cité est une organisation qui œuvre pour la poursuite de la vie en fonction, certes, des ressources de son territoire, mais aussi par des choix qui peuvent très bien laisser de côté une grande partie de ces ressources. Elle peut même travailler à sa propre dissolution.
Aristote parlait de l’enfant comme substance commune en tant qu’il est issu d’un projet qui unit étroitement un couple et lui permet de durer ; de même la cité est unie dans un projet en acte. Mais il n’y a pas de substance du collectif (au contraire de la ruche, de l’essaim). Qu’une communauté puisse constituer un seul corps, même métaphorique, ne se réalise jamais que dans l’action. Voyez le corps de l’Église selon Paul, 1 Cor 10.17 : « Comme il n’y a qu’un seul pain, nous tous, malgré notre grand nombre, nous ne formons qu’un seul corps, puisque nous partageons entre tous ce pain unique ». Ici l’action commune est le partage du pain. D’où l’inévitable fragilité de toute communauté humaine et la nécessité de « penser le commun » ensemble, dans la discussion, si dure soit-elle, qui n’évite pas le conflit des intérêts. Et dans le compromis.
I. Retour sur une définition et son application au monde contemporain
On n’a jamais autant parlé de commun qu’aujourd’hui dans nos économies ultra-libérales. Dans des sociétés fondées sur un régime juridique opposant public et privé,
« Le commun n’est pas le public. Il n’est pas non plus le collectif. Il part de manière volontariste, égalitaire, des individus eux-mêmes qui s’associent pour gérer ensemble une ressource sur laquelle le droit leur accorde une prise (droit de propriété, droit d’usage) de manière à en réserver et en orienter l’usage selon des critères d’affectation qu’ils se donnent ensemble et qui stipulent expressément l’indisponibilité de la ressource à toute autre affectation (ou affectation qui empiéterait sur l’affectation décidée). »
Deux critères donc du commun imposent une discipline de tous les acteurs sociaux concernés : indisponibilité / affectation des ressources.
La machine étatique est ici trop lourde, trop rigide et trop éloignée du terrain pour imposer une telle discipline. Il faut l’instituer, mais autrement que par une loi.
« Face à l’absence de “droit commun des biens communs”, le détournement d’outils juridiques existants se manifeste comme une pratique du droit œuvrant concrètement pour non seulement protéger mais aussi instituer le commun. »
(Claire Jeannereau, Mémoire de Master 2 en « Systèmes juridiques et droits de l’homme » de l’Université Paris-Nanterre, Année universitaire 2021-2022).
II. La tragédie des communs
Or, ce qui rend la question aujourd’hui si actuelle et les conflits d’intérêt si puissants, c’est le fait que nous rencontrions désormais les limites des ressources offertes par notre terre entière, tout en continuant de nier ces limites. En même temps l’humanité (moyennant des infrastructures colossales) s’élargit vers des territoires vierges par l’inclusion d’un « métavers » tenu pour immatériel et pourtant lourdement dévorateur de matière, et par l’extension verticale de son emprise sur les sous-sols, les fonds marins ou l’espace, dont personne n’a jusqu’ici défini la propriété et qui sont l’objet d’une prédation déchaînée (qu’on songe simplement à Elon Musk).
L’expression « tragédie des communs » est née paradoxalement de la plume d’un malthusien, Hardin, qui invite à diminuer la natalité pour ne plus trop peser sur les ressources. La tragédie des communs témoignerait d’un dilemme exprimé par Aristote :
« Ce qui est commun à tous fait l’objet de moins de soins, car les hommes s’intéressent davantage à ce qui est à eux qu’à ce qu’ils possèdent en commun avec leurs semblables. »
Je vous laisse lire ce qu’en écrivait Nietzsche :
« Comment y aurait-il un ‘’bien commun’’ ? Le mot renferme une contradiction : ce qui peut être commun n’a jamais que peu de valeur […] vouloir s’accorder avec le grand nombre [relève d’un] mauvais goût » [dont] « il faut s’affranchir : la ‘’prospérité générale’’ n’est pas un idéal, pas une fin, pas une idée un tant soit peu praticable, mais seulement un vomitif »
(Par-delà le bien et le mal, II, § 43 et VIII, § 228, cité dans Michel Nodé-Langlois, « L’idée de bien commun », Philopsis.fr, 2007)
Nous ne partagerons pas cet excès de langage, mais il constitue au moins un avertissement. Il nous fait comprendre la nécessité, pour limiter l’usage immodéré, le gaspillage et l’entretien négligé des ressources communes, d’introduire une contrainte, une discipline, dans leur gestion. Les solutions envisagées se déclineraient, selon Hardin, en trois termes : nationalisation, privatisation, ou gestion par les acteurs locaux.
C’est cette troisième voie et son efficacité qui ont été explorées par la récipiendaire du prix Nobel d’économie 2009, Elinor Ostrom. De nombreux exemples montrent en effet que des collectifs d’acteurs locaux sont ou ont été parfaitement capables d’instaurer sur le long terme une distribution équitable de ressources vitales, mais susceptibles de rareté, comme l’eau.
Je vous invite cependant, dans la suite de cet exposé, à prendre un peu de recul par rapport au monde où nous nous débattons avec au mieux des orientations malthusiennes, vertueuses et contraignantes.
III. La littérature ethnographique peut-elle nous aider à cerner la question ?
Nous avons beaucoup à apprendre, en effet, des sociétés qui nous ont précédés et de celles qui parfois subsistent à la marge de notre monde global. J’en tirerai ici trois premiers enseignements :
A. La concurrence, dans toutes les sociétés, vise surtout des biens symboliques et c’est d’abord dans ce but qu’elle dilapide les ressources, non pour s’approprier ces ressources en elles-mêmes.
Voyez l’exemple de l’île de Pâques, avec ses 1 042 statues de basalte, les moaï, de 4 m de hauteur moyenne, et près de 300 terrasses empierrées supportant ces statues : de vastes forêts ont dû fournir les troncs d’arbre nécessaires à ces travaux. Ce n’est donc pas le besoin de ressources élémentaires, mais les croyances et une organisation sociale sans doute hiérarchique qui ont épuisé l’île avant que la colonisation et désormais le changement climatique (notez un incendie dévastateur en 2022) n’en menacent définitivement les trésors touristiques.
Remarquons aussi dans les statues moaï une surévaluation de l’humain (l’ancêtre masculin ?) dont nous sommes sans doute prisonniers nous aussi. Une telle surévaluation n’a pas toujours ni partout prévalu. Et la préhistoire, où l’homme privilégiait les représentations animales, pourrait nous indiquer une alternative (comme le suggère Philippe Grosos dans son livre La philosophie au risque de la préhistoire, Paris, Cerf, 2023). La perspective d’une telle alternative est portée aujourd’hui par des personnalités scientifiques aussi marquantes que l’ethnologue et anthropologue Philippe Descola par exemple.
B. Malgré leurs besoins vitaux et leur dépendance aux ressources du territoire, les sociétés humaines ont depuis l’origine largement manifesté la possibilité d’élaborer ou de choisir collectivement, consciemment et volontairement, y compris en interne, des modes d’organisation variés.
Évoquons simplement les variations saisonnières des modes de vie. Nous prendrons l’exemple des Inuit. On reparle aujourd’hui de la stérilisation forcée, entre les années 1940 et le début des années 1970, des femmes indigènes du Groenland par les Danois. Quelle était la justification, autre que raciale, d’une telle politique ? Le problème n’était pas la surpopulation. Marcel Mauss, à partir de ses seules sources livresques, a excellemment décrit en 1906 la vie des Eskimos : malgré la présence récente des Européens, les Eskimos de son temps ne densifiaient guère leur nombre ni n’aggravaient leur impact sur des territoires immenses, aux ressources saisonnières et limitées. Ils n’exploitaient que les étroites franges de terres côtières. Ils menaient une vie totalement différente en hiver et en été. (On remarque une telle variation saisonnière chez beaucoup d’autres populations, par exemple chez les Indiens des plaines d’Amérique du Nord. Selon Lowie, ces derniers menaient une vie dispersée sauf pour la chasse au bison à l’occasion de laquelle de vastes rassemblements nécessitaient aussi toute une organisation, dont une police musclée. Ou bien, au Brésil, les « chasseurs-cueilleurs » Nambikwaras étudiés par Lévi-Strauss pratiquaient une petite agriculture en été). L’été donc, les Eskimos se dispersaient dans des tentes de peau par familles nucléaires sur les étroites bandes côtières pour chasser et pêcher. L’hiver était un temps d’abondance : ils se regroupaient par clans dans des maisons de bois ou de neige adossées à une pente et desservies par d’étroits et longs couloirs d’entrée. Chacune de ces maisons accueillait plusieurs familles, et ils vivaient en commun une vie culturelle et religieuse intense, ponctuée par des sortes d’orgies rituelles. Il semble qu’initialement chaque maison collective dans ce regroupement ait eu son accès séparé vers une maison commune des hommes, où l’on palabrait à longueur de journée.
C. C’est aujourd’hui la complexité de la mondialisation et l’explosion des communications qui épuisent ou détruisent les ressources du commun.
Jean-Marc Jancovici faisait remarquer que dans notre civilisation planétaire, plus il y a de communications, plus il y a des marchandises qui circulent, plus les déchets s’accumulent, plus les ressources s’épuisent. Aujourd’hui la planète se charge elle-même du problème de la surpopulation, comme si les nécessités physiques agissaient en rouleau compresseur pour exercer un effet de retour dévastateur sur l’emprise humaine : diminution des ressources en eau douce, en terres fertiles, en gibier halieutique et terrestre // uniformisation des modes de vie (et donc perte collective de mémoire, de savoir-faire et de diversité) et interdépendance massive, qui obligent à ces échanges colossaux au niveau planétaire... // diminution mondiale de la fertilité humaine et disparition d’innombrables espèces vivantes.
Nous avons ainsi à gérer des communs négatifs : voir Alexandre Monnin, « Les “communs négatifs”. Entre déchets et ruines », Études, 9/2021, p. 59-68. La pollution nous touche tous.
Pensez aussi aux guerres. Jamais les guerres n’ont connu pareils impacts. Avec le risque de l’accident nucléaire majeur et définitif, risque qui imposerait la perpétuation d’un même savoir sur des dizaines de millénaires… Ces communs négatifs, eux aussi, demandent à être traités politiquement, ensemble, et urgemment.
Ainsi donc la vraie question actuelle n’est pas celle du partage raisonné d’un gâteau, au-delà des nécessités vitales ; mais d’un agir commun qui invente, librement (avec le minimum de contraintes légales ou réglementaires externes) et collectivement, une discipline partagée. Nous sommes dans l’urgence, oui, mais nous pouvons encore être assis là à philosopher. Sauf triomphe d’un absurde trumpien ou du totalitarisme, nous pouvons encore nous orienter, de manière inventive, et localement d’abord — ce qui ne signifie pas en cercles fermés, au contraire.
Je voudrais enfin situer l’urgence où nous sommes par rapport à la longue histoire de l’humanité.
IV. Une nouvelle histoire de l’humanité
A. Bref rappel de l’échelle des temps
Homo sapiens a été précédé et, longtemps, accompagné par des branches du genre homo nombreux et divers ; il est apparu vers la fin du Pléistocène, il y a environ 300.000 ans, alors que le paléolithique avait commencé il y a plus de 3.000.000 d’années. Homo sapiens a donc eu largement le temps de se répandre dans tout l’espace africain et eurasien pour diffuser des savoir-faire communs. Par exemple, la technique acrobatique de récolte de miel sauvage, avec des cordes, de longues perches et un panier, le long de falaises à pic, est documentée tant par des peintures sur les parois d’une grotte préhistorique d’Espagne que par des enquêtes ethnographiques du XXe siècle auprès des Kulung Rai au Népal (voir figures 1 et 2).
Homo sapiens a atteint les Amériques il y a 40.000 ans seulement environ. Des formes d’organisation entièrement déconnectées de celles de l’Afrique-Eurasie y ont vu le jour.
B. Un chef d’œuvre de David Graeber et David Wengrow : Au commencement était… Une nouvelle histoire de l’humanité, trad. fr., Les liens qui libèrent, 2021 (The Dawn of everything. A New History of Humanity, 2021)
Cet ouvrage est venu heureusement concurrencer un best-seller, Homo Deus. Une brève histoire de l’avenir, par Yuval Noah Harari (1ère éd. en Israël, 2015) : Harari avançait notamment la menace que la Silicon Valley et ses clones forgeront un homme nouveau, un homme-dieu, et rendront inutile le reste de l’humanité. Assistons-nous actuellement à la déconfiture d’un tel pronostic ?
David Graeber, mort en 2020, fut aussi un militant anarchiste : il pourfendait notamment une théorie de l’évolution (incarnée par un certain Napoleon Chagnon) qui place la compétition et la violence masculines au sommet du progrès.
Les deux auteurs, l’un anthropologue et économiste, l’autre archéologue, revisitent toutes les idées reçues sur le passé de l’humanité à la lumière des découvertes les plus récentes. Je passe ici en revue six des thèses qu’ils exposent.
1. Cosmopolitisme de nos ancêtres
Nous l’avons vu avec la technique de récolte du miel sauvage : les hommes du paléolithique pérégrinaient librement sur d’incroyables distances et pouvaient rencontrer d’un bout à l’autre d’un continent l’hospitalité et une compréhension mutuelles malgré la variété probable des idiomes. Aujourd’hui encore, on constate que des populations de cueilleurs (comme les Hadzas de la vallée du Rift en Tanzanie) sont « étonnamment cosmopolites » lors de leurs regroupements sédentaires. Les frontières seraient apparues d’abord par schismogenèse, quand, la population augmentant, des tribus voisines ont prétendu s’affirmer les unes contre les autres, ce qui a du coup limité les déplacements.
Notre monde supposé mondialisé, remarquons-le, est en réalité plus cloisonné que jamais. Sa caricature extrême, c’est Gaza, « prison à ciel ouvert », ou le camp de réfugiés entouré de barbelés, l’un et l’autre entièrement dépendants d’une aide extérieure.
2) Récusation du mythe du bon sauvage, du progrès et de la notion d’évolution
Les auteurs s’élèvent contre une théorie dont ils reprochent en particulier la formulation à Rousseau. Il n’y a pas lieu de chercher « l’origine de l’inégalité parmi les hommes », parce qu’il y toujours eu de l’inégalité plus ou moins forte. La vraie question est de comprendre « comment nous nous sommes retrouvés bloqués » dans notre monde-prison : « pourquoi Homo sapiens, qui passe pour le plus sage des grands singes, a-t-il laissé s’installer des systèmes inégalitaires rigides et permanents après avoir monté et démonté des structures hiérarchiques pendant des millénaires ? »
3) Remise en question de la « révolution néolithique »,
qui serait apparue entre 6000 et 2000 ans av. n. è., avec le développement de l’agriculture, puis des villes, des « grandes » civilisations. En réalité les hommes du paléolithique auraient pratiqué une agriculture dilettante depuis la nuit des temps, et en auraient longtemps volontairement rejeté le développement ainsi que la sédentarisation qui volontiers l’accompagne. Ce qui ne les empêchait pas de concevoir et d’ériger, à l’occasion des rites collectifs qui les réunissaient en grand nombre, des ensembles de constructions monumentales. Voyez par exemple Göbekli Tepe et ses environs en Turquie, 7000 ans avant la « civilisation » mésopotamienne ! Même en se sédentarisant, les hommes ont très bien pu bâtir des villes égalitaires, rejetant le pouvoir coercitif de l’État qui accompagnait ailleurs ces émergences (ce dont témoignent des « mégasites » archéologiques d’Ukraine ou de Bulgarie vers la fin du cinquième millénaire av. n. è., ou bien Uruk en Mésopotamie). Les forêts dites primaires d’Amazonie doivent leur foisonnante biodiversité aux sélections végétales des ex-nombreuses agglomérations indigènes, qui se passaient d’État (Pierre Clastres, La société contre l’État, Paris, Minuit, 1974). L’Amazonie d’avant la Conquête a été aussi travaillée, mais autrement travaillée que les paysages d’Europe !
4) Les sociétés de chasseurs-cueilleurs-agriculteurs occasionnels étaient des sociétés d’abondance
(et non d’une quête épuisante de survie), où l’on ne se posait pas la question de l’accumulation : sauf cultes et recherche de prestige, on produisait et consommait uniquement ce dont on avait besoin. (Marshall Sahlins, 1930-2021, dans Âge de pierre, âge d’abondance [Stone Age Economics, 1974], Paris, Gallimard, 1976).
5) Il n’est pas vrai qu’il y ait un lien nécessaire entre accroissement démographique et structures de domination.
En témoigne, chez un cacique huron (Ontario, Canada) nommé Kandiaronk (les auteurs citent Gabriel Sagard, Le grand voyage au pays des Hurons, Paris, Denys Moreau, 1632), la critique indigène de l’envahisseur européen et de ses usages et croyances paranoïaques. Cette critique indigène aurait fortement influencé l’ouverture d’esprit de Montaigne par exemple.
Pour les auteurs, il faut enfin distinguer trois formes de liberté — de quitter les siens, de désobéir aux ordres et de reconfigurer sa réalité sociale— et trois formes de domination : par le contrôle et l’appropriation de la violence, par l’information (permettant surveillance et bureaucratie), par le charisme individuel (qui, de César à Staline ou Hitler, a souvent reposé sur une forme de monstruosité ou des facultés exceptionnelles).
La réunion de ces trois principes de domination, selon Graeber et Wengrow, est précisément ce qui ligote nos sociétés (nous pourrions leur offrir comme exemple la répression disproportionnée de Notre-Dame des Landes et des Soulèvements de la terre), alors que les données archéologiques, historiques, ethnographiques montrent « qu’ils n’ont aucune raison particulière d’être associés, et encore moins de se renforcer mutuellement, comme ils le font dans les régimes modernes » (p. 465).
Conclusion
Ce grand voyage dans le temps et dans l’espace permet à Graeber et Wengrow de nous offrir une perspective résolument optimiste et créative : l’individu homo sapiens a toujours été ce qu’il est aujourd’hui, mais c’est dans l’invention foisonnante des formes de sa vie collective qu’il se crée et se développe lui-même. Au milieu des convulsions de notre siècle, une telle inventivité reste entièrement à notre portée, quel que soit le poids des « communs négatifs » à traiter, pour peut que nous en conservions la liberté. Il faut abandonner les perspectives téléologiques. Alors, vive les collectifs, les associations, les communautés, les communes ! Inventons, agissons, militons !