Il ne s’agit pas ici de nier le nombre d’églises présentes en France, le nombre personnes se disant chrétienne – en diminution constante ces dernières année- mais bien d’affirmer qu’un pays, une nation ne peut pas se revendiquer de ce qui est un choix personnel.
Pour nous, être chrétien, c’est s’engager personnellement à suivre le Christ et son enseignement, à faire un choix radical pour vivre pleinement l’évangile. Dire que la France est chrétienne m’ôte à moi cette possibilité d’affirmer ma foi et de proclamer « j’ai choisi de suivre Christ ». Cela rabaisse le message révolutionnaire de l’évangile à un simple style architectural – le fameux manteau d’églises -, à un corpus culturel ou artistique plus ou moins connu et partagé, à une vision d’un passé fantasmé.
Mais pire encore est de se servir de cette excuse pour rejeter l’étranger ; Car un christianisme qui rejette l’étranger, c’est t un christianisme qui rejette l’exode et le deutéronome : « Souviens-toi que tu es toi-même étranger et esclave » (Ex. 22/20, 23/9 - Deut. 5/15, 10/19, 26/5...). C’est un christianisme qui rejette l’évangile de Matthieu : « Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais étranger, et vous m’avez recueilli ; » (Mt 25/35). C’est un christianisme qui oublie que Pierre nous dit « vous êtes étrangers et voyageurs sur la Terre » (1Pi 2:11) . C’est un christianisme qui rejette finalement le fondement même du message évangélique « aime ton prochain comme toi-même ». C’est un christianisme qui rejette le récit biblique tout entier fondé sur la figure de l’étranger, messager de Dieu à accueillir.
Antoine Rolland, Stéphane Lavignotte, Laurent Gagnebin, Philippe Kabongo, Mathieu Gervais, Marina Touillez, Philippe Guttinger, Philippe Wender et Bertrand Marchand se réclamant du Christianisme social.
Ce texte est initialement paru dans Réforme du 23 juin 2016.